À retenir
Les prescriptions de tramadol ont augmenté ces dernières années, et notamment sur la période d’analyse choisie ici (2003-2019). Or, il existe classiquement une certaine corrélation entre la dynamique de prescription d’une molécule et les risques de mésusage ou d’exposition accidentelle à ces molécules. Ces évènements sont de plus en plus évoqués outre-Atlantique, chez l’adulte comme chez l’enfant. Mais la connaissance des conséquences toxiques de cette exposition reste encore imprécise. Les études portant sur le sujet sont la plupart du temps relatives à de petits effectifs et se rapportent aussi à des études n’ayant pas distingué les formulations à libération immédiate de celles à libération prolongée. Aussi, une étude française a souhaité mieux définir l’incidence et les risques associés à ces cas afin de mieux en connaître les risques et les modalités de surveillance.
Méthodologie
Cette étude a analysé de façon rétrospective les expositions au tramadol à libération immédiate (LI) non associées à d’autres substances chez les enfants ≤6 ans à partir des données recueillies par les centres antipoisons français entre 2003 et 2019. Elles ont été analysées selon le score de gravité du poison (PSS).
Principaux résultats
Au total, durant la période considérée, 1.260 expositions aiguës au tramadol LI ont été signalées aux centres antipoisons, soit une médiane de 83 cas par an. Il s’agit donc d’une augmentation significative au cours de la période de l’étude (p <0,0001). Le nombre de cas était inférieur à 30 par an avant 2005 et il est devenu supérieur à 100 depuis 2015. Cette dynamique apparaît corrélée à celle du nombre de prescriptions de tramadol LI en médecine générale tous âges confondus jusqu’en 2011. Au-delà, la fréquence des prescriptions a diminué mais pas celle des expositions accidentelles (hormis un infléchissement en 2019).
L’analyse du profil toxicologique lié au tramadol LI chez l’enfant a porté sur 145 cas (27,9%) d’exposition aiguë par voie orale associée à une dose ingérée identifiée de >1 mg/kg et avec une période de suivi de 6 heures minimum, après avoir écarté 740 cas d’exposition accidentelle simultanée à d’autres toxiques et 375 autres cas pour lesquels certains critères d'inclusion n’étaient pas remplis (notamment données de suivi disponible, dose ingérée renseignée…)
Toutes ces expositions étaient non intentionnelles, et principalement dues à une erreur thérapeutique (57,3%, souvent pour pathologie ORL ou chirurgie ORL récente) ou à un comportement exploratoire de l’enfant (42,7%).
La dose médiane ingérée était de 50,0 mg, soit 5,0 mg/kg. La moitié des enfants (49,7%) sont restés asymptomatiques et 8,3% avaient des symptômes sévères. Aucun décès n'a été observé. Les enfants symptomatiques ont ingéré une dose de tramadol significativement plus élevée que ceux qui sont restés asymptomatiques (10,0 mg/kg contre 3,9 mg/kg, p<0,0001).
Parmi les patients symptomatiques, les principaux symptômes (88%) étaient neurologiques et majoritairement légers (67,2%), tandis que les symptômes gastro-intestinaux étaient peu fréquents (12%), et principalement légers à modérés.
Les deux tiers de ces enfants ont été pris en charge en milieu hospitalier. Une courbe prédictive du risque de symptômes neurologiques modérés à sévères a été établie avec une bonne précision (AUC 0,92) et a permis d’établir que le seuil de 7,4 mg/kg était associé à la plus haute sensibilité et peut être utilisée pour discriminer ceux relevant d’une surveillance hospitalière.
L’absence de convulsion observée parmi les 145 patients et, plus largement chez les 375 autres qui avaient été exclus de l’analyse parce que plusieurs molécules toxiques étaient associées, peut interroger : les auteurs évoquent la taille de l’effectif comme un rationnel possible mais aussi le fait que cette étude, contrairement aux autres, ne regroupe pas d’enfant intoxiqués par une forme à libération prolongée.
- D’après une analyse des données françaises des centres antipoisons, l’exposition au tramadol à libération immédiate est rare chez les enfants de moins de 6 ans mais apparaît malgré tout en progression depuis une vingtaine d’années, ce qui contraste avec les données de la littérature.
- Elle conduit à une toxicité dose-dépendante, principalement neurologique, mais sans convulsion.
- Les auteurs de ce travail estiment qu’une exposition au tramadol <7,4 mg/kg non associée à une autre molécule peut être gérée à domicile, avec une surveillance étroite pendant au moins 6 h de la part des parents, à condition que les enfants n’aient pas d’antécédents de convulsions, de chirurgie ou maladie ORL récente, ou de pathologie rénale ou hépatique chronique.
Les prescriptions de tramadol ont augmenté ces dernières années, et notamment sur la période d’analyse choisie ici (2003-2019). Or, il existe classiquement une certaine corrélation entre la dynamique de prescription d’une molécule et les risques de mésusage ou d’exposition accidentelle à ces molécules. Ces évènements sont de plus en plus évoqués outre-Atlantique, chez l’adulte comme chez l’enfant. Mais la connaissance des conséquences toxiques de cette exposition reste encore imprécise. Les études portant sur le sujet sont la plupart du temps relatives à de petits effectifs et se rapportent aussi à des études n’ayant pas distingué les formulations à libération immédiate de celles à libération prolongée. Aussi, une étude française a souhaité mieux définir l’incidence et les risques associés à ces cas afin de mieux en connaître les risques et les modalités de surveillance.
Méthodologie
Cette étude a analysé de façon rétrospective les expositions au tramadol à libération immédiate (LI) non associées à d’autres substances chez les enfants ≤6 ans à partir des données recueillies par les centres antipoisons français entre 2003 et 2019. Elles ont été analysées selon le score de gravité du poison (PSS).
Principaux résultats
Au total, durant la période considérée, 1.260 expositions aiguës au tramadol LI ont été signalées aux centres antipoisons, soit une médiane de 83 cas par an. Il s’agit donc d’une augmentation significative au cours de la période de l’étude (p <0,0001). Le nombre de cas était inférieur à 30 par an avant 2005 et il est devenu supérieur à 100 depuis 2015. Cette dynamique apparaît corrélée à celle du nombre de prescriptions de tramadol LI en médecine générale tous âges confondus jusqu’en 2011. Au-delà, la fréquence des prescriptions a diminué mais pas celle des expositions accidentelles (hormis un infléchissement en 2019).
L’analyse du profil toxicologique lié au tramadol LI chez l’enfant a porté sur 145 cas (27,9%) d’exposition aiguë par voie orale associée à une dose ingérée identifiée de >1 mg/kg et avec une période de suivi de 6 heures minimum, après avoir écarté 740 cas d’exposition accidentelle simultanée à d’autres toxiques et 375 autres cas pour lesquels certains critères d'inclusion n’étaient pas remplis (notamment données de suivi disponible, dose ingérée renseignée…)
Toutes ces expositions étaient non intentionnelles, et principalement dues à une erreur thérapeutique (57,3%, souvent pour pathologie ORL ou chirurgie ORL récente) ou à un comportement exploratoire de l’enfant (42,7%).
La dose médiane ingérée était de 50,0 mg, soit 5,0 mg/kg. La moitié des enfants (49,7%) sont restés asymptomatiques et 8,3% avaient des symptômes sévères. Aucun décès n'a été observé. Les enfants symptomatiques ont ingéré une dose de tramadol significativement plus élevée que ceux qui sont restés asymptomatiques (10,0 mg/kg contre 3,9 mg/kg, p<0,0001).
Parmi les patients symptomatiques, les principaux symptômes (88%) étaient neurologiques et majoritairement légers (67,2%), tandis que les symptômes gastro-intestinaux étaient peu fréquents (12%), et principalement légers à modérés.
Les deux tiers de ces enfants ont été pris en charge en milieu hospitalier. Une courbe prédictive du risque de symptômes neurologiques modérés à sévères a été établie avec une bonne précision (AUC 0,92) et a permis d’établir que le seuil de 7,4 mg/kg était associé à la plus haute sensibilité et peut être utilisée pour discriminer ceux relevant d’une surveillance hospitalière.
L’absence de convulsion observée parmi les 145 patients et, plus largement chez les 375 autres qui avaient été exclus de l’analyse parce que plusieurs molécules toxiques étaient associées, peut interroger : les auteurs évoquent la taille de l’effectif comme un rationnel possible mais aussi le fait que cette étude, contrairement aux autres, ne regroupe pas d’enfant intoxiqués par une forme à libération prolongée.