Les individus touchés par le Covid-19 ont plus de risque de développer par la suite un déficit cognitif, selon une étude longitudinale chinoise qui a suivi pendant un an une cohorte de patients âgés de 60 ans et plus après leur hospitalisation pour une infection par le SARS-CoV2 [1]. Les risques de déclin cognitif et de démence sont particulièrement élevés à la suite d’une forme sévère de la maladie.
« Nous avons observé que le Covid-19, en particulier dans les cas les plus sévères, est associé à un risque accru de troubles cognitifs et à un déclin cognitif plus précoce après l’infection », a commenté le Pr Yan-Jiang Wang (Daping Hospital, Third Military Medical University, Chongqing, Chine), auprès de Medscape édition internationale.
« Le plus préoccupant » est de constater que le Covid-19 « pourrait augmenter de manière significative le problème de la démence au niveau mondial » en période post-pandémique, estime le neurologue.
Les chercheurs soulignent que ces données vont dans le sens d’autres travaux réalisés précédemment notamment ceux de Taquet M et coll.[2] Aussi, ils précisent qu’auparavant d’autres études ont montré que les maladies respiratoires graves pouvaient avoir un effet négatif sur les fonctions cognitives. Environ 15% des patients infectés par le syndrome respiratoire aigu sévère ou le syndrome respiratoire du Moyen-Orient ont présenté des déficits cognitifs à long terme, notamment sur la mémoire et l'attention[3].
12,5% de déficit cognitif léger à un an
Les troubles cognitifs sont fréquents pendant la phase aiguë du Covid-19. Les séquelles à plus long terme de l’infection sur le plan neurologique étant encore méconnues, cette étude apporte un éclairage sur l’évolution de la fonction cognitive après avoir guéri d’une infection par le SARS-CoV2, précise le Pr Wang.
Dans cette étude, 1 438 individus infectés par le SARS-CoV2, dont 260 ayant développé une forme grave, ont été suivis pendant un an après leur prise en charge dans trois hôpitaux de la ville de Wuhan, en Chine, épicentre de la pandémie de Covid-19. Un groupe témoin de 438 individus non infectés a également été constitué.
Les patients atteints de Covid-19 étaient âgés de 60 ans et plus (âge médian de 69 ans). Avant d’être infectés, ces patients ne devaient pas présenter de symptômes liés à un déclin cognitif, de trouble neurologique ou d’antécédents familiaux de démence. Ils ne devaient pas non plus souffrir de cancer ou d’une pathologie sévère d’origine cardiaque, hépatique ou rénale.
Après un an de suivi, les résultats montrent que 12,5% des individus touchés par le Covid-19 présentent un déficit cognitif léger, caractérisé par un score TICS-40 (Telephone Interview for Cognitive Status) de 20 points et moins. En considérant uniquement les patients ayant survécu à une forme sévère, l’incidence du déficit léger est deux fois plus élevé (26% contre 5% après une forme non sévère).
Les cas sévères plus à risque de démence
Les cas de déclin cognitif léger et de démence apparaissent plus fréquents après une forme sévère de Covid-19, comparativement aux individus touchés par une forme moins grave et à ceux du groupe témoin. À six mois, on compte 10% de démence (score TICS-40 de 12 points et moins) chez ceux qui ont développé une forme sévère de l’infection. À 12 mois, le taux passe à 15%. Après une forme non sévère, le taux de démence est < 1%, sans différence significative par rapport au groupe contrôle.
Après ajustement sur divers facteurs de biais (âge, sexe, IMC…), l’analyse des données montre que les formes sévères de Covid-19 sont associées à un risque de déclin cognitif précoce presque 5 fois plus élevé, en comparaison avec le groupe témoin (Odds ratio (OR) 4,87 [3,30-7,20]). Dans le cas d’un Covid-19 non sévère, le risque de déclin précoce est moindre (OR 1,71 [1,30-2,27]).
À la suite d’une forme sévère de Covid-19, le risque d’avoir un déclin cognitif d’évolution tardive est encore plus élevé (OR 7,58 [3,58-16,03]), de même pour le déclin d’évolution progressive, le risque étant alors multiplié par un facteur 19, comparativement aux individus non infectés par le SARS-CoV2 (OR 19 [9,14-39,51]).
Appliquer des mesures préventives
Les résultats montrent ainsi que 21% des individus ayant guéri d’une forme sévère de la maladie présentent à un an les signes d’un déclin cognitif d’évolution progressive, ce qui suggère que le Covid-19 pourrait avoir un impact négatif à long terme sur la fonction cognitive, soulignent les chercheurs.
Pour expliquer cet impact, ils évoquent les événements neurovasculaires induits par le Covid, l’hypoxie dans les formes graves, une possible action directe du virus sur le cerveau et l’inflammation qui a tendance à se maintenir après la guérison, en particulier dans les cas de Covid-19 les plus sévères. Cette inflammation chronique pourrait agir sur l’activité des cellules microgliales, qui semblent avoir un rôle dans le développement des maladies neurodégénératives.
Les chercheurs indiquent que l’impact du Covid a pu être surestimé dans l’étude en raison de l’absence d’évaluation cognitive avant l’infection. Toutefois, ils appellent à prendre des mesures pour limiter les effets cognitifs liés à la maladie.
« Etant donné que les individus qui survivent à une forme sévère de Covid-19 ont un risque élevé de développer un déficit cognitif à long terme, des mesures doivent être appliquées pour protéger le cerveau à la phase aiguë de l’infection et prévenir le déclin cognitif après hospitalisation », a souligné le Pr Wang.
Ces travaux ont été financés par la National Natural Science Foundation of China. Les auteurs n'ont pas déclaré de liens d'intérêt.
Cet article a été écrit par Megan Brooks et initialement publié sur Medscape.com, traduit et adapté par Vincent Richeux pour Medscape France.
« Nous avons observé que le Covid-19, en particulier dans les cas les plus sévères, est associé à un risque accru de troubles cognitifs et à un déclin cognitif plus précoce après l’infection », a commenté le Pr Yan-Jiang Wang (Daping Hospital, Third Military Medical University, Chongqing, Chine), auprès de Medscape édition internationale.
« Le plus préoccupant » est de constater que le Covid-19 « pourrait augmenter de manière significative le problème de la démence au niveau mondial » en période post-pandémique, estime le neurologue.
Les chercheurs soulignent que ces données vont dans le sens d’autres travaux réalisés précédemment notamment ceux de Taquet M et coll.[2] Aussi, ils précisent qu’auparavant d’autres études ont montré que les maladies respiratoires graves pouvaient avoir un effet négatif sur les fonctions cognitives. Environ 15% des patients infectés par le syndrome respiratoire aigu sévère ou le syndrome respiratoire du Moyen-Orient ont présenté des déficits cognitifs à long terme, notamment sur la mémoire et l'attention[3].
12,5% de déficit cognitif léger à un an
Les troubles cognitifs sont fréquents pendant la phase aiguë du Covid-19. Les séquelles à plus long terme de l’infection sur le plan neurologique étant encore méconnues, cette étude apporte un éclairage sur l’évolution de la fonction cognitive après avoir guéri d’une infection par le SARS-CoV2, précise le Pr Wang.
Dans cette étude, 1 438 individus infectés par le SARS-CoV2, dont 260 ayant développé une forme grave, ont été suivis pendant un an après leur prise en charge dans trois hôpitaux de la ville de Wuhan, en Chine, épicentre de la pandémie de Covid-19. Un groupe témoin de 438 individus non infectés a également été constitué.
Les patients atteints de Covid-19 étaient âgés de 60 ans et plus (âge médian de 69 ans). Avant d’être infectés, ces patients ne devaient pas présenter de symptômes liés à un déclin cognitif, de trouble neurologique ou d’antécédents familiaux de démence. Ils ne devaient pas non plus souffrir de cancer ou d’une pathologie sévère d’origine cardiaque, hépatique ou rénale.
Après un an de suivi, les résultats montrent que 12,5% des individus touchés par le Covid-19 présentent un déficit cognitif léger, caractérisé par un score TICS-40 (Telephone Interview for Cognitive Status) de 20 points et moins. En considérant uniquement les patients ayant survécu à une forme sévère, l’incidence du déficit léger est deux fois plus élevé (26% contre 5% après une forme non sévère).
Les cas sévères plus à risque de démence
Les cas de déclin cognitif léger et de démence apparaissent plus fréquents après une forme sévère de Covid-19, comparativement aux individus touchés par une forme moins grave et à ceux du groupe témoin. À six mois, on compte 10% de démence (score TICS-40 de 12 points et moins) chez ceux qui ont développé une forme sévère de l’infection. À 12 mois, le taux passe à 15%. Après une forme non sévère, le taux de démence est < 1%, sans différence significative par rapport au groupe contrôle.
Après ajustement sur divers facteurs de biais (âge, sexe, IMC…), l’analyse des données montre que les formes sévères de Covid-19 sont associées à un risque de déclin cognitif précoce presque 5 fois plus élevé, en comparaison avec le groupe témoin (Odds ratio (OR) 4,87 [3,30-7,20]). Dans le cas d’un Covid-19 non sévère, le risque de déclin précoce est moindre (OR 1,71 [1,30-2,27]).
À la suite d’une forme sévère de Covid-19, le risque d’avoir un déclin cognitif d’évolution tardive est encore plus élevé (OR 7,58 [3,58-16,03]), de même pour le déclin d’évolution progressive, le risque étant alors multiplié par un facteur 19, comparativement aux individus non infectés par le SARS-CoV2 (OR 19 [9,14-39,51]).
Appliquer des mesures préventives
Les résultats montrent ainsi que 21% des individus ayant guéri d’une forme sévère de la maladie présentent à un an les signes d’un déclin cognitif d’évolution progressive, ce qui suggère que le Covid-19 pourrait avoir un impact négatif à long terme sur la fonction cognitive, soulignent les chercheurs.
Pour expliquer cet impact, ils évoquent les événements neurovasculaires induits par le Covid, l’hypoxie dans les formes graves, une possible action directe du virus sur le cerveau et l’inflammation qui a tendance à se maintenir après la guérison, en particulier dans les cas de Covid-19 les plus sévères. Cette inflammation chronique pourrait agir sur l’activité des cellules microgliales, qui semblent avoir un rôle dans le développement des maladies neurodégénératives.
Les chercheurs indiquent que l’impact du Covid a pu être surestimé dans l’étude en raison de l’absence d’évaluation cognitive avant l’infection. Toutefois, ils appellent à prendre des mesures pour limiter les effets cognitifs liés à la maladie.
« Etant donné que les individus qui survivent à une forme sévère de Covid-19 ont un risque élevé de développer un déficit cognitif à long terme, des mesures doivent être appliquées pour protéger le cerveau à la phase aiguë de l’infection et prévenir le déclin cognitif après hospitalisation », a souligné le Pr Wang.
Ces travaux ont été financés par la National Natural Science Foundation of China. Les auteurs n'ont pas déclaré de liens d'intérêt.
Cet article a été écrit par Megan Brooks et initialement publié sur Medscape.com, traduit et adapté par Vincent Richeux pour Medscape France.