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Acinetobacter baumannii, bactérie redoutée, se « cache » dans les cellules pour se multiplier

Rédigé le Jeudi 31 Mars 2022 à 13:30 |



Acinetobacter baumannii est une bactérie nosocomiale particulièrement problématique dans les hôpitaux, du fait de sa résistance aux antibiotiques. Dans une étude publiée dans la revue mSystems, une équipe lyonnaise montre que certaines souches sont très invasives et établissent une sorte de « cachette » au sein des cellules infectées, permettant la multiplication bactérienne.

Bactérie problématique

Acinetobacter baumannii est une bactérie nosocomiale, redoutée, majoritairement problématique dans le milieu hospitalier. « Elle touche des patients en soins intensifs, sous assistance respiratoire, des grands brûlés, des personnes immunodéprimées et en soins de longue durée », détaille Suzana Salcedo, chargée de recherche Inserm, qui dirige une équipe de recherche CNRS au laboratoire de Microbiologie Moléculaire et Biochimie Structurale à Lyon.
Cette bactérie peut provoquer une infection des plaies, des infections urinaires, des pneumonies voire des septicémies. L’un des traitements fréquemment utilisés pour la traiter est à base de carbapénèmes, mais elle est malheureusement devenue extrêmement résistante à ces antibiotiques et elle a une capacité importante à résister aux désinfectant utilisés dans les hôpitaux. « Elle est très difficile à éliminer », résume la microbiologiste pour Medscape édition française. Plus inquiétant encore : elle commence à avoir des résistances aux antibiotiques de dernier recours comme la colistine. « En France, nous avons encore des souches d’Acinetobacter baumannii sensibles aux antibiotiques, mais dans d’autres pays européens, plus de 80% de ces bactéries sont résistantes aux carbapénèmes, aminoglycosides et fluoroquinolones », alerte Suzana Salcedo.
 

Une « cachette » pour se multiplier

Le projet de son équipe, financé par la Fondation pour la Recherche Médicale, vise à trouver de nouveaux moyens de combattre les bactéries résistantes. Pour cela, les chercheurs ont récolté des souches cliniques d’Acinetobacter baumannii, au lieu d’utiliser des souches de laboratoire, comme le font la plupart des études.
« Traditionnellement, Acinetobacter baumannii est vue comme une bactérie extra-cellulaire, qui se multiplie surtout en-dehors des cellules. Or, lorsque nous avons commencé à utiliser des souches cliniques, notamment des souches associées à un fort taux de mortalité chez des personnes hospitalisées dangereuses, nous avons observé qu’elles sont capables d’entrer dans les cellules humaines et de créer une sorte de niche protégée, une « cachette », qui permet aux bactéries de se multiplier à l’intérieur des cellules », raconte-t-elle. Les conséquences possibles de l’utilisation de cette cachette pourraient non seulement être de protéger la bactérie de l’attaque du système immunitaire, mais aussi de rendre plus difficile l’accès à certains antibiotiques pour agir sur ces bactéries. « Quand les bactéries entrent dans ce compartiment un peu plus acide de la cellule, l’antibiotique est neutralisé ou, au moins, perd en efficacité », explique Suzana Salcedo.

 

Souches hyper-invasives

L’équipe a mis en place un criblage pour tester un nombre élevé de souches cliniques de bactéries. « Sur 43 souches testées, 5 ont cette capacité de se multiplier dans les cellules et, parmi elles, 2 sont hyper-invasives, c’est-à-dire qu’elles ont une capacité très importante à envahir les cellules par rapport à toutes les autres », précise la chercheuse. « Actuellement, nous préparons une collection plus importante pour savoir quelle est la prévalence de ces souches dans les hôpitaux », complète-t-elle.
À présent, les chercheurs vont se concentrer sur les voies utilisées/détournées par les bactéries et sur les protéines qu’elles utilisent pour créer cette niche, afin de mieux en cerner les mécanismes d’action. Mais les conséquences de cette première découverte sont multiples.
« À court terme, il est important au niveau clinique de faire un choix d’antibiotiques qui soient efficaces dans les cellules, dans le cas où on n’arrive pas à éliminer ces bactéries. Et à plus long terme, il faudra prendre cela en compte pour développer la prochaine vague d’antibiotiques », estime-t-elle. Son équipe est en discussions avec des sociétés pharmaceutiques qui ont un pipeline de médicaments antimicrobiens en cours de développement et qui souhaiteraient les tester sur ces types de souches.
« À très long terme, si on parvient à comprendre les mécanismes d’action de ces bactéries, on pourra les cibler pour empêcher l’infection et donc développer de nouvelles stratégies thérapeutiques », envisage Suzana Salcedo. Pour poursuivre ses recherches, son équipe est en quête d’autres souches françaises de la bactérie. « Si des médecins rencontrent ce type de souches résistantes dans leur service hospitalier, qu’ils n’hésitent pas à nous contacter ! », conclut-elle.
Cet article a été écrit par Anne-Gaëlle Moulun et initialement publié sur Medscape.
 


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