Les femmes souffrant de rhumatismes inflammatoires chroniques, polyarthrite rhumatoïde ou spondylarthrite, prennent-elles leur traitement de fond pendant la grossesse ? Pour le savoir, le Dr Anna Molto (rhumatologue, hôpital Cochin) a réalisé une grande étude de cohorte rétrospective dont les principaux résultats ont été présentés en séance plénière lors du congrès annuel de la Société Française de Rhumatologie (SFR 2021)[1]. Elle montre que moins de 40% des patientes ont poursuivi leur traitement de fond au cours de leur grossesse, et cette proportion chute à moins de 20% lorsqu'il s'agit d'un traitement de fond biologique. En revanche, ces mêmes patientes restent encore trop exposées aux corticoïdes au cours de la grossesse.
La grossesse correspond souvent à une lune de miel pour beaucoup de patientes atteintes d'un rhumatisme inflammatoire chronique. « D'après des données rétrospectives, on sait que 50% des patientes s'améliorent pendant la grossesse et c'est d'autant plus vrai pour les formes bénignes de la maladie », précise Anna Molto à Medscape. Mais d'autres, notamment celles dont la maladie est la plus active, ne connaîtront pas cette période d'accalmie. Dans quelle mesure poursuivent-elles leur traitement de fond ? Quelles sont les molécules qui leur sont prescrites ? Pour l'instant, il s'agit d'une étude « purement descriptive », selon les mots de sa principale investigatrice, mais des analyses ultérieures permettront de savoir quel impact aura eu la poursuite ou l'arrêt des traitements sur la santé de la femme, le déroulement de la grossesse, voire la santé du fœtus.
Moins de 40% de traitement de fond pendant la grossesse
Pour établir un état des lieux de la situation des femmes atteintes d'un RIC au cours de la grossesse, la rhumatologue a mené avec le centre de pharmaco-épidémiologie de l'AP-HP Pitié-Salpêtrière - Charles Foix une étude de cohorte rétrospective à partir des données de remboursement du Système National des Données de Santé (SNDS). 11 274 patientes atteintes d'une polyarthrite rhumatoïde ou d'une spondylarthrite prenant un traitement de fond et ayant mené une seule grossesse au cours de la période 2008-2017 ont ainsi été identifiées. Les différentes expositions – traitements symptomatiques (anti-inflammatoires et corticoïdes), les traitements de fond (conventionnels et biologiques) – aux trois trimestres de la grossesse ont été analysées.
« Il y a moins de 40% des femmes de la cohorte qui ont continué leur traitement de fond pendant la grossesse et moins de 20% qui poursuivent leur traitement de fond biologique (à 90 % des anti-TNFalpha) », a indiqué Anna Molto lors de la présentation qui note que cette étude reflète bien la situation des femmes reçues à sa consultation. « Quand on regarde les expositions par trimestre de grossesse, le pourcentage de patientes sans traitement de fond augmente chaque trimestre de façon linéaire », a-t-elle poursuivi. C'est le cas aussi des anti-TNF alpha, « qu'on sait pourtant être sûrs pendant la grossesse ».
L'étude a mis en lumière aussi des divergences concernant les expositions par pathologie. Ainsi les femmes atteintes d'une spondylarthrite reçoivent moins souvent un traitement de fond pendant la grossesse mais plus d'anti-inflammatoires. Celles atteintes d'une polyarthrite rhumatoïde sont plus exposées aux corticoïdes au cours de leur grossesse.
Une exposition trop importante aux corticoïdes
La consommation d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens, qui ont une contre-indication formelle à partir du deuxième trimestre de grossesse, concerne presque un tiers des femmes de la cohorte. « Certes, elle se limite au premier trimestre mais on en connaît déjà les effets délétères », a commenté le Dr Molto rappelant qu'en pré-conceptionnel, la prise d'AINS peut aussi avoir un impact négatif sur la fertilité.
Concernant l'exposition aux corticoïdes, la spécialiste déplore qu'elle se poursuive tout au long de la grossesse pour 40% des patientes, avec deux tiers des prescriptions pour des doses supérieures à 10 mg, « des doses qu'on considérerait inacceptables au long cours ». Pourquoi une telle prévalence des corticoïdes pendant la grossesse ? Interrogée par Medscape édition française, elle l'explique par le fait que ces médicaments, très connus des rhumatologues, soulagent très efficacement la douleur, mais aussi parce que l'on craint encore, à tort, de potentiels effets secondaires des biothérapies arrivées plus récemment sur le marché.
Les biothérapies ont changé radicalement la prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde et de la spondylarthrite depuis une décennie, la première AMM pendant la grossesse a concerné le certolizumab il y a cinq ans. « Quand on reproduira cette analyse avec des données récentes, j'espère que les biothérapies auront pris une place plus importante et qu'il y aura moins de corticoïdes », conclut Anna Molto qui souligne l'importance d'une consultation pré-conceptionnelle pour les patientes atteintes d'un RIC.
La grossesse correspond souvent à une lune de miel pour beaucoup de patientes atteintes d'un rhumatisme inflammatoire chronique. « D'après des données rétrospectives, on sait que 50% des patientes s'améliorent pendant la grossesse et c'est d'autant plus vrai pour les formes bénignes de la maladie », précise Anna Molto à Medscape. Mais d'autres, notamment celles dont la maladie est la plus active, ne connaîtront pas cette période d'accalmie. Dans quelle mesure poursuivent-elles leur traitement de fond ? Quelles sont les molécules qui leur sont prescrites ? Pour l'instant, il s'agit d'une étude « purement descriptive », selon les mots de sa principale investigatrice, mais des analyses ultérieures permettront de savoir quel impact aura eu la poursuite ou l'arrêt des traitements sur la santé de la femme, le déroulement de la grossesse, voire la santé du fœtus.
Moins de 40% de traitement de fond pendant la grossesse
Pour établir un état des lieux de la situation des femmes atteintes d'un RIC au cours de la grossesse, la rhumatologue a mené avec le centre de pharmaco-épidémiologie de l'AP-HP Pitié-Salpêtrière - Charles Foix une étude de cohorte rétrospective à partir des données de remboursement du Système National des Données de Santé (SNDS). 11 274 patientes atteintes d'une polyarthrite rhumatoïde ou d'une spondylarthrite prenant un traitement de fond et ayant mené une seule grossesse au cours de la période 2008-2017 ont ainsi été identifiées. Les différentes expositions – traitements symptomatiques (anti-inflammatoires et corticoïdes), les traitements de fond (conventionnels et biologiques) – aux trois trimestres de la grossesse ont été analysées.
« Il y a moins de 40% des femmes de la cohorte qui ont continué leur traitement de fond pendant la grossesse et moins de 20% qui poursuivent leur traitement de fond biologique (à 90 % des anti-TNFalpha) », a indiqué Anna Molto lors de la présentation qui note que cette étude reflète bien la situation des femmes reçues à sa consultation. « Quand on regarde les expositions par trimestre de grossesse, le pourcentage de patientes sans traitement de fond augmente chaque trimestre de façon linéaire », a-t-elle poursuivi. C'est le cas aussi des anti-TNF alpha, « qu'on sait pourtant être sûrs pendant la grossesse ».
L'étude a mis en lumière aussi des divergences concernant les expositions par pathologie. Ainsi les femmes atteintes d'une spondylarthrite reçoivent moins souvent un traitement de fond pendant la grossesse mais plus d'anti-inflammatoires. Celles atteintes d'une polyarthrite rhumatoïde sont plus exposées aux corticoïdes au cours de leur grossesse.
Une exposition trop importante aux corticoïdes
La consommation d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens, qui ont une contre-indication formelle à partir du deuxième trimestre de grossesse, concerne presque un tiers des femmes de la cohorte. « Certes, elle se limite au premier trimestre mais on en connaît déjà les effets délétères », a commenté le Dr Molto rappelant qu'en pré-conceptionnel, la prise d'AINS peut aussi avoir un impact négatif sur la fertilité.
Concernant l'exposition aux corticoïdes, la spécialiste déplore qu'elle se poursuive tout au long de la grossesse pour 40% des patientes, avec deux tiers des prescriptions pour des doses supérieures à 10 mg, « des doses qu'on considérerait inacceptables au long cours ». Pourquoi une telle prévalence des corticoïdes pendant la grossesse ? Interrogée par Medscape édition française, elle l'explique par le fait que ces médicaments, très connus des rhumatologues, soulagent très efficacement la douleur, mais aussi parce que l'on craint encore, à tort, de potentiels effets secondaires des biothérapies arrivées plus récemment sur le marché.
Les biothérapies ont changé radicalement la prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde et de la spondylarthrite depuis une décennie, la première AMM pendant la grossesse a concerné le certolizumab il y a cinq ans. « Quand on reproduira cette analyse avec des données récentes, j'espère que les biothérapies auront pris une place plus importante et qu'il y aura moins de corticoïdes », conclut Anna Molto qui souligne l'importance d'une consultation pré-conceptionnelle pour les patientes atteintes d'un RIC.