Cigarette électronique : une aide éventuelle au sevrage tabagique selon le HSCP

Rédigé le Mercredi 12 Janvier 2022 à 11:43 |



En comparaison des pays de même niveau économique, la prévalence du tabagisme est très élevée en France métropolitaine : en 2020, 31,8% des 18-75 ans fumaient, dont 25,5% quotidiennement. Les cigarettes électroniques, ou SEDEN (systèmes électroniques de délivrance de la nicotine), sont d’usage nettement moins fréquent : 5,4% des adultes, dont 4,3% l’utilisent quotidiennement. Chez les adultes, elles sont quasi-exclusivement utilisées par des fumeurs ou des ex-fumeurs, pour réduire ou arrêter leur consommation de tabac, alors que chez les adolescents, cette motivation est minoritaire. Aucun produit ou dispositif ne dispose d’une AMM (autorisation de mise sur le marché) pour une indication d’aide au sevrage tabagique. Ce sont donc des produits de consommation dont l’usage est réglementé et non des médicaments.

Deux méta-analyses contradictoires

La DGS (Direction générale de la santé) a demandé au HCSP (Haut Conseil de la santé publique) d’actualiser ses recommandations de 2016 sur ces produits, notamment en ce qui concerne leur intérêt potentiel dans l’aide au sevrage tabagique. L’avis du Haut Conseil tient compte notamment de deux méta-analyses parues à dix mois d’intervalle : celle de Hartmann-Boyce et al (2021, Fondation Cochrane) et celle du Health Research Board irelandais (2020). Les résultats des deux sont contradictoires : la première conclut à une relative supériorité par rapport aux thérapies de substitution nicotinique d’efficacité démontrée, la seconde ne montre aucune différence. Les données de tolérance sont au mieux insuffisamment renseignées.

En conséquence, le HCSP conclut que « les connaissances fondées sur les preuves sont insuffisantes pour proposer les SEDEN comme aides au sevrage tabagique dans la prise en charge des fumeurs par les professionnels de santé. » Cependant, cela « n’exclut pas que le rapport bénéfices/risques de ces produits utilisés hors système de santé puissent représenter une aide pour certains consommateurs et contribuer ainsi à améliorer leur santé, » ainsi que dans certaines populations vulnérables à forte dépendance nicotinique et n’ayant qu’une « faible adhésion aux traitements validés. » Dans ces cas, le HCSP recommande fortement l’arrêt complet du tabac. L’utilisation chez la femme enceinte est déconseillée en l’absence de données. Les mélanges « maison » sont à bannir.

Un décalage entre les données scientifiques et les convictions des praticiens

Il faut noter qu’une enquête menée auprès de 110 tabacologues par la Société francophone de tabacologie montre que 95,5% d’entre eux considèrent que le vapotage est un outil d’aide au sevrage tabagique, mais que la majorité déclare ne pas disposer d’éléments suffisants pour comparer son efficacité à celle des traitements médicamenteux validés.

Par ailleurs, le Haut Conseil maintient sa recommandation d’interdiction des SEDEN chez les adolescents en vertu du principe de précaution concernant le fait qu’ils pourraient favoriser l’entrée dans le tabagisme. En effet, si « les données scientifiques sont en faveur du rôle initiateur des SEDEN dans la consommation de tabac », l’absence d’une étude de cohorte française ne permet pas de l’affirmer. Le Haut Conseil préconise ainsi la constitution de ce type de cohorte et l’approfondissement des recherches. Il note enfin qu’actuellement rien ne permet d’affirmer ou d’infirmer que les SEDEN conduisent à une renormalisation du tabagisme promue par les industries du tabac, dont le marketing en faveur de la cigarette électronique est avéré.